LA CHANSON LA PLUS VIEILLE DE LA TERRE
































“Vous pénétrez sur un site constitué de plusieurs couches d’histoires, en concrétions. À l’état post-domestique, le lieu est redevenu sauvage, plus vous creusez plus vous remontez le temps; votre corps est votre meilleur outil. Projection Room devient, le temps d’une soirée, un espace féral tolérant la présence de dix spécialistes et de 90 spectateurs. À tout moment nous pourrons venir vous chercher: vous nous reconnaîtrez au son de la musique. Entrez et nourrissez-vous avant de disparaître.” 

Comme les inventeurs découvrent une grotte, La Chanson la plus vieille de la terre, deuxième volet du projet CHC, est la mise en exergue in situ de cette découverte. Onze artistes performeurs, vidéastes et céramistes, ont donné à voir, autour d'un dîner tellurique, deux heures d'exploration dans cet ancien cinéma abandonné, Projection Room.

L'action a été menée de front par quatre maîtresses de cérémonie (elles-mêmes à la base du projet CHC), installées au centre de l'espace autour d'une table des stratégies, tour technique, source électrique, régie fictionnelle. Les spectateurs, éclatés dans l'espace, prennent place par groupe de trois autour de plateau repas, minutieusement emballés de cellophane translucide. Sur les parois, des projections révèlent les ombres et les reliefs, une grotte en terre humide abrite un écosystème artificiel, la cuisine déborde des vapeurs opaques du bain-marie. 
Les performeurs agissent seuls, ils jouent de l'invisible, à l'image de sondes-chercheuses en plein travail, ils captent l'obscurité. Ce n'est ni le mythe de la caverne, ni l'histoire du proto-cinéma, mais ce qui apparaît sous nos yeux, parle de cette archéologie de l'image, d'une persistance rétinienne impossible à capturer. Le blackout survient, il fait disparaître les derniers reflets et rend au lieu son état sauvage. Les spectateurs sortent à l'air libre, avec en mémoire les fragments de cette ritournelle.

Credits / R.Lachenal ; L.Gleizes ; PEZCORP.